De l'encre et du papier

De l'encre et du papier

une histoire faite de mots en R

La rumeur nous soufflait qu'un rêve était à notre porter . La rage nous habitait et le rire n'était plus de mise . Nous avions le rognon en overdose et nous finissions par ne plus roter que des relents de regrets, le rectum bouché par la constipation que cette vie de dingue nous mettait en épreuve. Même la vue des couleurs d'une renoncule nous laissait de marbre. 
La rue déserté de ses passants , plus une terrasse d'ouverte pour boire un ricard , sur les rotules , un brin relou dans mes fringues vintages , j'avais envie de soulever une révoltution à la vue de cette tristesse ambiante . Je me sentais comme dans ma période ragnagna ...irritable !! 
Cette randonnée dans la ville m'avait ouvert l'appétit, j'aurais bien avalé une raclette, j'en avais plein les roubignoles et la rate au court bouillon . Tant de rancoeur chez les gens qui n'avaient plus le courage de partir en résistance. Plus la force de revivre après ces heures si sombres , ils étaient pourtant robustes. Mais le sang versé avait rougi le pavé et les robes des femmes . J'aurais voulu briser les roustons de ces barbares qui avaient créé une rupture définitive entre l'avant et l'après . Le réveil fut difficile . Les relations étaient tendues et la réputation de cette espèce humaine s'était confirmée dans l'horreur . 
Il m'était difficile de faire jouer les rimes et rigoler sur le verbe me semblait indécent.
Rien ne justifiait cette sauvagerie . La France avait rarement vécu d'heures aussi sombres . Ce n'était pas qu'un simple grippage dans les rouages de notre république et bien loin d'être régler avec quelques réformes .
Le 13 novembre 2015 serait à tout jamais peint en rouge .
Je ne voyais pas une réconciliation possible avec des hommes aux mœurs qui semblaient venu d'un autre siècle . Ils avaient le coeur si noir que même un ramoneur ne pourrait parvenir au sortir d'une cheminée , à l'être autant . 
Mes rollers au pieds je glissais sur les trottoirs , les murs ressemblaient aux peinture rupestres mais l'histoire racontée sur ces dessins de rue était la violence que nous vivions et l'animal sauvage était l'homme.
L'histoire recommençait comme dans heures les plus sinistres et les larmes de Remy me tordaient les tripes . 
Je crois que plus jamais nous retrouverons le repos .

Romain, Rose, Robin et Raya étaient une bande de potes soudée depuis les bancs du lycée . Robin était le romantique de la bande, Raya rêvait de vivre avec eux dans un beau royaume et n'était pas du genre à causer régime. Romain se voyait sous une tonnelle dans un fauteuil en rotin et Rose à ses côté à lui chanter une ritournelle . De doux rêveurs et c'était bon de les voir ainsi réunis . 
Se retrouver ensemble dans un café et profiter des réjouissances d'une soirée qui s'annonçait riante et heureuse.
Les discussions étaient bruyantes, joyeuses, leurs rires rebondissaient sur les murs de la rue . Roses et Raya étaient resplendissantes. 
On sentait plus que du respect entre eux. C'était pour moi une révélation de réaliser qu'une telle amitié pouvait résister à tout . Ils ne m'avaient pas rejeter comme un intrus venant s'immiscer dans leur cercle . Et je riais soudain en me rappelant de leur résolution : vivre ensemble toujours quoiqu'il arrive, et supporter d'entendre ronfler Romain à la vie à la mort !! S'en suivit un fou rire comme jamais j'avais entendu. 
Leurs vies unies comme une belle romance. 
Ils étaient jeunes et roucoulaient dans leur amours comme un chat qui ronronne. Mangeaient des pizzas reines pas toujours réussies sans tenir compte des calories. 
Élevaient un rat et attendaient chaque jour le retour du printemps pour se régaler de la rosée et rugir dans leur jardin pour le fêter ...ils ne voulaient aucun regret et ne pas tomber dans le renoncement au bonheur. 
Ils vivaient au rythme du temps et refusaient de réitérer les erreurs de leur parents. Ainsi rassemblés, ils se sentaient forts comme l'arbre centenaire qui offrait ses branches solides en ramages . 
Leur réussite était leur rencontre et même si on pouvait reprocher le romantisme de Romain ou l'utopie de leur rêves, ils étaient pour moi l'exemple du bonheur. 
Les deux filles, ravissantes dans leurs tenues excentriques, me faisait imaginer le prince qui viendrais ramper à leur pieds pour tenter de les conquérir .

Les rayons du soleil avait réchauffé la journée , le vendredi se concluait dans la douceur et le moment de se réunir enfin . Partager autre chose qu'une boite de raviolis passé rapidement par le micro onde . 
Un détour par la place de la république, lieu devenu le point de rassemblement incontournable de la capitale depuis les attentats de Charlie. 
Ils avait vécu l'événement ici main dans la main. Se sentant investit d'une mission, qu'ils soient la génération de la renaissance des liens sociaux, du partage et de l'ouverture vers la paix . Relier les hommes dans une belle fraternité , ils y croyaient .
Paris rutilait , sa splendeur rayonnait dans le monde. Qu'elle était belle cette capitale. 
On ruminait souvent dans ses embouteillages mais pour rien au monde nous ne l'aurions quittée. 
On part mais on revient toujours à ses premières amours parait-il . Et je remerciais le ciel d'être née ici . Je me régalais de me mélanger comme les légumes dans une ratatouille , à toutes cette foule hétéroclite, sur les champs Elysée un soir de victoire . 
J'aimais Paris pour les riens et les tous. 
Je rejoignais ravie et avec impatience cette bande de copains qui regardaient le monde en toute relativité. Des personnes uniques que le destin m'avait offert sur ce chemin chaotique ,ils m'avaient aidé à avancer et à rentrer dans le processus de résilience. 
Les moments passés en leur compagnie étaient toujours une récréation . Je poursuivais ma route dans la rêverie de ces instants de joies . 
Nous allions encore débattre et portés nos regards sur la société , sur le racisme, sur la mal bouffe , sur tous les sujets qui nous venaient au hasard. Comme d'habitude nous allions nous restaurer de tapas et râler sur la rareté des épices dans les plats pour relever les saveurs, rassurés de savoir que le mojito aurait toujours le même gout . On rigolerait des blagues entendus à la radio. 
Un rendez vous qu'aucun d'eux n'auraient manqué et qui leur permettait de renouer avec l'essentiel , l'amitié .. J'étais heureuse d'être acceptée dans ce cercle. 

Nos retrouvailles comme une fête chaque fin de semaine . 
Avant que je fasse leur connaissance, ils en avaient déjà beaucoup vecu. Ils avaient ramé aussi , des galères, des bobos de la vie . Ils m'avaient raconté leur aventure en roulotte quand ils voulaient traverser l'Europe et des galères comme des belles choses . Ils étaient fidèles à leurs idées, à leurs opinions, je crois que de les traiter de renégats aurait été la pire insulte pour eux . 
En revanche il fallait les suivre et être rapide au risque de paraitre ridicule car ils avaient une telle répartie que parfois j'avais l'impression d'être dans une émission de Ruquier . Ils apportaient à ma vie un véritable renouveau et toute autre richesse n'aurait eu raison de mon attachement à eux . Même pas la proposition de partir d'un coup d'avion manger une bouillabaisse sur le port de Marseille avec la pêche du jour de mon ami Roger et ses filets plein de rascasses . 
J'aurai résisté à toute autre tentation pour ne pas les quitter le vendredi soir . 
Et puis comment me passer des beaux yeux de Rana soulignés par du rimmel . Des yeux d'un noir rarissime qui aurait fait battre en retraite n'importe quel homme quand ils montraient un brin de colère. Ils étaient radieux quand son sourire les faisaient briller et sur moi ils faisait se sacré ravages je dois l'avouer . 
Je réalisais soudain que les embouteillages pouvaient me mettre en retard pour le repas. 
Roule mon Raoul , roule roucoule roulement roulade ..., je m'amusais à égrener tous les mots en " roul " qui me venait à l'esprit , ça évitait que je m'énerve sur les embouteillages . La place rouge me vient soudain en image, la Russie un pays qui aurait été génial de parcourir avec eux , je leur proposerai ce soir . Des projets c'était important d'en avoir. Cela permettait de raviver les souvenirs de ceux que nous avions pu réaliser et de se donner des buts . Redécouvrir ensuite les albums souvenirs . Raphaëlle , une ami, m'avait initié à l'art de la photo , j'ai fait mes premiers essais dans le potager de mes parents , je m'amusais à figer sur pellicule les légumes , le radis sortant tout juste de terre et la tomate sous toutes les coutures ...les souvenirs , parfois marrants , parfois ridicules , mais toujours émouvants . 
Le portable vibra , un SMS , Renaud sans doute qui attendait toujours ma réponse pour savoir si je l'accompagnaiS au Bataclan .
Je rentrais à présent dans le quartier , il me fallait trouver une place . Je mettais sur mon rhume la responsabilité de mon mal de tête qui commençait à s'installer, ce mal était un rusé , un vrai renard , il s'immisçait toujours au mauvais moment dans mon crâne , j'en avais un peu ras le bol . Je luis avais donné un nom d'ailleurs pour l'apprivoiser , Rosalie , mon mal de tête s'appelait Rosalie , je l'avais marié avec Roméo mon mal de dos . Mais jamais ces deux là me rabaisseraient à me mettre au fond de mon lit un vendredi soir . 
Ma voiture enfin ranger tant bien que mal , je ramassais mes affaires éparpillées sur le siège passager , tout jeté en vrac dans mon sac et j'étais en route pour une toute petite marche jusqu'au bistrot , je ne craignais rien malgré les rumeurs de racailles qui pouvaient trainer ici et là , je m'évitais ce genre d'angoisse sinon autant rester cloitrer chez moi si c'était pour avoir peur à chaque coin de rue . Mon Pote Robin m'avait glissé une bombe lacrymogène dans mon sac mais vu le bazar, je crois que je serais morte avant de la trouver .Mon tendre Robin des bois qui prenait soin de moi , ingrate que j'étais, relax mon ami, tout irait bien , j'arriverai à bon port sans avoir à dégainer ! 
Allez il fallait accélérer, la réalité de l'heure me faisait presser le pas et je détestais les retards . Il fallait que je pense à noter la recette de leur blanquette de saumon pour ma mère, je marchais vite et pensais vite , j'avais un roman à mettre sur papier aussi , ce week-end si le temps me le permettait, j'avancerais un peu . Appeler Robert , mon oncle , qui pouvait être aussi généreux que radin, un homme paradoxe , que j'adorais et qui me faisait rire chaque fois qu'il me racontait ses anecdotes . 
La première fois je m'étais perdue dans le quartier, j'avais tourner longtemps comme dans un rond point quand on rate sa direction. 
J'avais penser à rapporter le bouquin que j'avais emprunter à Rana , une belle romance, un truc bien rose qui avait eu un succès énorme , 50 nuance de grey. 
Il avait ravi mes soirées solitaires de la semaine, il ne méritait pas la récompense du grand prix littéraire mais il m' avait détendu. Il était souvent difficile de respirer dans Paris et pas possible de s'évader alors la littérature légère me donnait ce bol d'air. Et je courais pour l'heure vers une soirée sous le signe de la rigolade ..
20h30 , me voilà enfin arrivée au bistrot, un peu essoufflée, ils étaient déjà attablés devant un verre de mojito. Rose fumait une cigarette, Rudy le serveur, courait comme à son habitude entre les espaces rikiki des tables sur la terrasses .
L'ambiance était posée, rieuse et animée. La bise à chacun et je me posais enfin. 
Rhoooo ce monde, le tout Paris était ici !! Le Paris gai, jeune, celui qui paraissait insouciant mais plus réaliste qu'on ne le pensait, qui donnait du renouveau à la morosité ambiante qui régnait depuis janvier. Loin du Paris qu'on appelait bobo. Ce Paris là brillait comme un rubis, ce Paris là rigolait tout en ayant conscience des responsabilités qu'une vie exigeait . Il respirait , nous étions les rois du monde et je me sentais rajeunir à ses côté, rieuse et loin du robot de bureau, l'autre moi . 
Rudy m'apporta mon verre de ratafia, j'avais besoin d'un remontant rapide et efficace. Romain était en train de raconter qu'il s'était pris un râteau cette semaine en voulant inviter une stagiaire, " non merci , ne m'en tenez pas rancune mais je dois décliner votre inviation " , il nous répétait les paroles de la stagiaire en imitant une voix de femme , Rana rigolait sous son écharpe, il faisait un peu frai, malgré les lampes chauffantes. Et Romain ,qui pour se justifier, de draguer au bureau, et devant nos moqueries, nous disait devoir ratisser large pour espére emballer!! 
Et toujours ce flux et reflux sur la terrasse, ceux qui sortaient fumer, ceux qui arrivaient, ceux qui ne faisaient que passer, on ce serait cru en pleine été, sur la côte . 
Rose me sortie un un bouquin de son sac en échange de celui que je lui avais emprunté , elle m'avait trouvé un livre de recette anciennes , pour ma mère qui n'avait de cesse de vouloir innover dans sa cuisine, elle aimait recevoir et surprendre par des nouveautés culinaires , son rôti de veau aux morilles et sa purée de céleris rave était un régal ,chaque fois elle y apportait quelques rajustements, je ne m'en lassais pas. 
Robin parlait des restrictions budgétaires sur les associations de quartier, qui mettaient en péril le travail de terrain fait par la police, d'en rebondissement dans une affaire qu'il avait dans ses dossiers, tout ceci en vrac ...et puis soudain 
Le bruit résonne encore, je n'ai pas réagit , juste dit "ça recommence " . Et puis ressentir la douleur dans la jambe , le silence et juste après les cris ..
Nous redoutions , depuis ce funeste 7 janvier , qu'il y en ai d'autres mais comment imaginer ...
Mon coeur bat trop fort , mes mains tremblent, je transpire, il m'est encore impossible de raconter, de l'écrire , de décrire cette horreur ..
Je les entends encore rire et j'ai la rage , nous avions un rêve ....ils ont assassiné mes amis , je voudrais hurler ..
mon roman un jour pour eux je l'écrirais . Je vous aimais, je vous aime, je vous aimerai à jamais . 
Se souvenir, Pour eux , Chloé, le 13 décembre 2015 . 

( fiction , d'un fait qui fut hélas bien réel ) 
l'histoire en R fut une belle affaire !! un grand merci à vous amis de l'encre , j'ai pris un grand plaisir à relever ce défi, il manquera sans doute des mots et encore quelques fautes de ci de là, peut être des incohérences aussi , je m'en excuse, j'ai écrit sans savoir où me conduirait ce fameux R, à l'aveugle comme on dit et je me suis prise au jeu en rêvant qu'un jour j'arriverais à écrire un roman, qui sait .....

Marie Buisson, de l'encre et du papier .
 


21/01/2016
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